Souhaibou Ouédraogo est un élève vivant avec un handicap moteur. En classe de terminale D, le jeune homme a réussi avec brio au baccalauréat session de 2023. Sa composition aux épreuves de l’examen qu’il vient de décrocher est un parcours du combattant. C’est simplement l’histoire inspirante d’un élève qui a su dompter son handicap physique par son intelligence.

Mention bien avec 14,08. C’est avec cette performance enviable par tout candidat au baccalauréat que Souhaibou Ouédraogo, élève vivant avec un handicap a décroché le baccalauréat série D à 18 ans. Ayant perdu l’usage de ses membres inférieurs à l’âge de deux ans, cet élève n’a pas fait de son handicap une fatalité. Comme la plupart des enfants de son âge, il est inscrit à l’école à l’âge de six ans. Dans l’impossibilité de se déplacer lui-même, l’orphelin de père voit sa mère se charger de l’y conduire et de le ramener à la maison tous les jours. Même pour ses besoins, il lui faut l’aide de ses camarades de classe. Malgré cette situation, les premiers résultats scolaires de Souhaibou sont impressionnants. C’est le début d’une brillante carrière scolaire.

Du CP1 au CM2, il ne laisse aucune chance à aucun de ses promotionnaires de goûter au rang de 1^er de classe. Souhaibou est toujours le premier de sa classe. Il obtient le CEP avec Brio. Avec l’entrée en 6^ème, il est affecté au Lycée privé Maranatha. Il se fait très vite remarquer et attire ainsi la sympathie de l’administration de cet établissement protestant basé à Bobo-Dioulasso. La direction l’exonère de tous les frais scolaires. Rapidement le jeune adolescent passe de la 6^ème à la 3^ème avec des moyennes records. Sans surprise, Souhaibou obtient le BEPC en 2020. Il est réaffecté dans son établissement d’origine. Il choisit de faire la 2^nde C qui se trouve à l’étage du bâtiment de l’école qui abrite cette classe.

Pendant que le brillant élève pense à son sort, la direction de l’établissement prend la décision de délocaliser la salle de classe au rez-de-chaussée pour qu’il puisse suivre les cours sans gymnastique. Les résultats de l’élève donne raison à la direction de l’école pour avoir pris cette décision taillée sur ses mesures. Souhaibou Ouédraogo défie encore les records de moyenne des classes du second cycle du lycée. A la rentrée scolaire 2022-2023, voilà Souhaibou en Tle D, classe redoutable pour tout élève ayant opté pour cette série. Mais du haut de son handicap physique, le jeune garçon se montre serein. Quand nous le croisions en décembre 2022 dans son établissement, il promettait d’obtenir le baccalauréat avec au moins la mention Bien. Une promesse que Souhaibou a tenu mais à quel prix ?

Souhaibou empoche le Bac D avec 14,08 de moyenne après un parcours du combattant

A l’approche de l’administration des épreuves écrites du Baccalauréat session 2023, Souhaibou découvre qu’il doit composer dans un centre situé à une quinzaine de kilomètres de son domicile. Avec son état physique, pas facile de parcourir une telle distance chaque jour pour composer. Son voisin de domicile au secteur 26 de Bobo-Dioulasso, Djakaria Ganou, taximan de son état décide de l’amener chaque jour à son centre de composition à Sakaby comme il l’a fait quand Souhaibou passait le BEPC. L’élève oublie que ses résultats ont profondément marqué son directeur d’école primaire qui suit de manière furtive son évolution scolaire. Mis au courant de la distance qui sépare le candidat de son jury, le directeur en question n’est pas resté insensible. Il loue une maison à Niénèta pour rapprocher Souhaibou de son centre de composition. Il y déménage avec sa mère et son fidèle ami d’enfance qui est devenu presque sa silhouette car c’est lui qui l’aide à se mouvoir et à tout faire.

A lire aussi-Bobo-Dioulasso : Malgré son handicap, Souhaibou Ouédraogo force l’admiration dans son école

Son voisin conducteur de taxi ne baisse pas les bras malgré cette alternative. Il venait ainsi chercher Souhaibou chaque matin pour le conduire à son centre de composition dont la distance n’est plus considérable. A l’issue de la composition des épreuves du premier tour, le candidat atypique au baccalauréat se montre confiant. « Comme c’est un examen, on préfère attendre les résultats sinon je maintiens ma promesse d’obtenir le Bac avec une bonne mention », nous-a-t-il rassuré avant les résultats quand nous lui posions la question sur ses impressions des sujets administrés.

Au résultat, Souhaibou Ouédraogo concrétise sa promesse et obtient le Baccalauréat avec 14,08. Une moyenne toujours sanctionnée par la mention Bien.

Le rêve de Souhaibou Ouédraogo après le Bac

Le Bac en poche, Souhaibou scrute à présent l’avenir de ses études avec un regard tourné vers les autorités et les bonnes volontés car il a un rêve. Le brillant élève rêve d’être un éminent informaticien et servir ainsi son pays. « Mon rêve est de devenir informaticien. C’est ma passion et ce profile convient le mieux à ma condition physique. Ce serait pour moi le canal par lequel je pourrai servir avec dévouement et loyauté mon pays. Je ferai tout pour déconstruire les préjugés autour des personnes vivant avec un handicap. On peut être handicapé physiquement mais on n’est nullement condamné à être handicapé intellectuellement. Je demande donc à ce qu’on m’aide à réaliser mon rêve car j’ai les capacités intellectuelles et il me reste maintenant les moyens pour y parvenir », plaide Souhaibou Ouédraogo pour la suite de ses études.

Le parcours de Souhaibou est la preuve vivante que le handicap n’est pas une fatalité. Il suffit juste de se décomplexer pour le dompter.

Abdoulaye Tiénon/Ouest Info