La saison des pluies est une période de forte demande en gaz butane. A Bobo-Dioulasso, cette forte demande entraine parfois un manque momentané de bouteilles de recharge chez les revendeurs. Au contact de ces derniers, le constat est palpable et les langues se délient sur les retards dans la chaine d’approvisionnement de cette source d’énergie domestique en cette période d’hivernage. Si certains acteurs voient dans le manque une lenteur dans l’approvisionnement, d’autres par contre accusent la forte demande des consommateurs en cette période de pointe. Un tour dans des lieux de recharge nous a permis de toucher du doigt les réalités du marché du gaz butane à Bobo-Dioulasso dans la journée du jeudi 10 juillet 2025.
Faire du café, chauffer de l’eau voire préparer en saison d’hivernage relève parfois d’un parcours du combattant pour les foyers qui utilisent exclusivement du bois de chauffe et/ou du charbon de bois. Car ces sources d’énergie traditionnelle sont aussi rares à avoir que difficiles à utiliser. Ainsi, certains de ces foyers se tournent vers le gaz butane pendant cette période. Une situation qui entraine une forte demande si fait que souvent l’on est tenté de penser à une pénurie.
A Bobo-Dioulasso, le constat est là est cette saison d’hivernage 2025. Chez les distributeurs de gaz, c’est la période des vaches grasses. Ils écoulent très rapidement les bouteilles de recharge qu’ils reçoivent. Mais difficile pour eux d’être approvisionner quand ils le veulent. La fréquence de la livraison reste la même chez la plupart des distributeurs. Et pire, la mise en service du dépôt de la SONABHY à Péni à rallonger les délais d’approvisionnement.
Distributeur de gaz butane, Zakaria Koné tient son point de recharge de bouteilles de gaz aux abords de la route du village de Nasso, à la sortie de Bobo-Dioulasso. Il vit mal cette situation de retard dans l’approvisionnement. D’un air embarrassé, il fait la garde devant son point de vente. L’étagère en métal où il stocke les bouteilles de gaz est vide. Plus de bouteilles de recharge disponibles.
Dans son magasin, quelques bonbonnes vides de différents poids sont encore couvertes de traces noires de cuisson, laissant croire que des consommateurs sont venus se procurer ses dernières bouteilles. Il explique l’absence de gaz à son point de vente par le long temps d’approvisionnement. Il n’occulte pas aussi la forte demande des clients en cette saison des pluies qui accentuent le manque à son niveau. Selon Zakaria Koné, la saison pluvieuse est le moment propice pour distribuer le gaz butane. « Le marché est fructueux durant la saison pluvieuse et la période d’harmattan. En ces moments, la demande croît au point d’entrainer une rupture de stock », fait savoir Zakaria Koné.
Pour ce dernier, cette forte n’a pas vraiment d’incidence sur ses revenus car le délai d’approvisionnement reste le même qu’en période de faible demande. Il explique ces retards de livraison par l’insuffisance de moyens logistiques du côté des fournisseurs. « Il est difficile de satisfaire tous les clients du fait du ralentissement des livraisons. Le problème est lié au fait que le dépôt de la Société Nationale Burkinabè d’Hydrocarbures (SONABHY) est désormais à Péni. Cela dit, il y a moins de véhicules qui transportent le gaz de Péni vers Bobo. Quand le dépôt était toujours à Bobo, je recevais le chargement de gaz chaque semaine mais maintenant il faut au minimum deux semaines avant d’être fourni », confie-t-il d’un ton résigné.
A environ deux kilomètres de Zakaria, Oumar Zonou est un autre distributeur de gaz. Assis sous le hangar de son point de vente, les yeux scrutant les va-et-vient sur le goudron, il guette la moindre opportunité de vente. Le visage marqué par la quarantaine bien entamée, il tient depuis plusieurs années, un point de distribution de gaz à BelleVille (secteur 29 de Bobo-Dioulasso). Devant sa boutique, cinq bouteilles de gaz posées à même le sol constituent le reste de sa dernière livraison. Pour lui, le plus gros défi à relever en cette période de forte demande reste la satisfaction des clients. Mais force est de constater, souligne-t-il, que le gaz se fait rare. « Souvent quand le gaz finit, on se lasse d’attendre. En ce moment, si les clients se présentent, ils repartent toujours déçus. C’est la SONABHY qui me livre le gaz et on n’a souvent pas d’explications claires et précises sur cet état de fait », a-t-il laissé entendre l’air désemparé.
Au secteur 21 de Bobo-Dioulasso, un point de ravitaillement est installé discrètement au coin d’une concession. À vue d’œil, rien ne distingue ce lieu des autres à part la silhouette calme de Mariam Sawadogo, assise devant sa boutique. Femme au foyer, elle s’occupe de la distribution de gaz en l’absence de son mari, propriétaire du point de vente. Entre les tâches domestiques et les clients qui passent, Mariam jongle entre les deux responsabilités sans se plaindre. Connaissant les périodes de forte demande et les besoins des ménages, elle tient avec assurance son rôle de distributrice, devenue pour elle, comme une activité naturelle au fil du temps. Elle confie que c’est en saison sèche que l’activité de distribution de gaz connait son point le plus bas. « C’est pendant la saison pluvieuse que j’arrive à écouler plus de gaz. La preuve est qu’il y a des fois où j’écoule tout le gaz que je reçois en un temps record. Ce qui fait que je peine à satisfaire ma clientèle pendant cette période. Cela est dû à la lenteur des livraisons », Mariam Sawadogo explique-t-elle son expérience dans la distribution de gaz butane.
Mariam Sawadogo lie les retards à une chaine d’approvisionnement ralentie et mal synchronisée. « Souvent les bouteilles vides peuvent faire plus d’une semaine en rechargement avant de nous parvenir. Pendant ce temps, la pénurie affecte les revendeurs et les consommateurs », raconte-t-elle.
De plus en plus, le gaz est en train de s’imposer à Bobo-Dioulasso comme source alternative d’énergie domestique en lieu et place du bois de chauffe et du charbon de bois. Ainsi, la période d’hivernage rime avec une forte demande de ce produit créant ainsi des ruptures momentanées au niveau des distributeurs. Cette ruée vers le gaz n’est pas seulement l’exercice des ménages. Il y a aussi des pratiques peu recommandables telles que l’utilisation du gaz subventionné par l’Etat par certains acteurs du transport urbain. En attendant que des mesures soient prises, distributeurs et consommateurs de gaz vont devoir prendre leur mal en patience. Dans tous les cas, c’est l’environnement qui gagne, avec le phénomène de la coupe abusive du bois qui va certainement reculer.
Ackim Traoré & Dofinitessan Kini (stagiaires) / Ouest Info