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Bobo-Dioulasso : Quand l’attiéké Burkinabè et ivoirien se dispute le marché

Au Burkina Faso, l’attiéké n’est plus seulement un produit d’importation. Une production locale s’organise et tente de s’imposer sur les marchés. Entre qualité perçue, habitudes des consommateurs et circuits de distribution, la concurrence est présente. A Bobo-Dioulasso, au cœur de ce commerce, des femmes, vendeuses grossistes, jouent un rôle central. Elles approvisionnent les clients pour une consommation directe ou pour alimenter les cuisines de petits restaurants. Une équipe de Ouest Info est allée à la rencontre de quelques vendeuses d’attiéké à Bobo-Dioulasso ce vendredi 04 juillet 2025, pour mieux comprendre.

L’attiéké, ce couscous de manioc très apprécié en Afrique de l’Ouest, est un incontournable produit de consommation à Bobo-Dioulasso. Longtemps importé exclusivement de Côte d’Ivoire, le marché de ce produit alimentaire populaire connaît aujourd’hui une marque de fabrique locale.

De petites unités de production burkinabè ont vu le jour, proposant un attiéké « made in Burkina ». Même si cet attiéké local gagne du terrain, les préférences des clients restent partagées.

Certains continuent de privilégier l’attiéké venu de Côte d’Ivoire, jugé plus moelleux et fidèle au goût traditionnel. C’est ce que nous explique Salimata Ouattara, vendeuse grossiste d’attiéké rencontrée aux abords de la place Tiefo Amoro, à Bobo-Dioulasso.

Installée au bord du goudron, son petit étalage est abrité par un grand parapluie qui lui sert de hangar. Assise sur une chaise en plastique, elle trône au milieu de ses marchandises soigneusement disposées. 

Des avocats, des plantains et différents formats d’attiéké emballés dans des sachets, gros comme petits. Sans attendre qu’on vienne à elle, elle s’empresse de s’approcher dès qu’un usager de la route se gare à proximité et cela pour toujours présenter ses produits.

Une manière à elle de capter l’attention des acheteurs, dans un espace concurrentiel. Selon elle, les clients manifestent une nette préférence pour l’attiéké venu de Côte d’Ivoire. Le goût, la texture et l’habitude y jouent pour beaucoup.

Elle explique que certains acheteurs de l’attiéké local reviennent parfois insatisfaits. « Les clients qui prennent l’attiéké burkinabè reviennent se plaindre des fois de sa qualité. Dans certains cas, nous sommes obligés de leur restituer leur argent », confie Salimata Ouattara.

Pour elle, l’importation de l’attiéké ivoirien a changé de moyen de transport. Ce qui influence directement son activité commerciale. « L’attiéké ivoirien nous parvenait grâce au train. Actuellement, ce sont les cars qui le transportent. Une fois à Bobo-Dioulasso, nous avons un fournisseur qui nous les livre à travers des tricycles. Le coût de revient se retrouve plus élevé qu’au moment où on était approvisionné par train. Si malgré la production locale d’attiéké, on continue d’importer l’attiéké ivoirien, c’est parce que je vends mieux et rapidement l’attiéké ivoirien », nous explique-t-elle.

Un peu plus loin, dans le même alignement que Salimata Ouattara, se trouve Abibata Nébié, également vendeuse d’attiéké. Installée sous un parapluie, elle a exposé sa marchandise sur une bâche soigneusement étalée au sol ainsi que sur un étal confectionné à cet effet.

Au bord d’une rue animée, Abibata garde l’œil sur les passants et se redresse dès qu’un usager ralenti ou jette des coups d’œil répété sur ses produits exposés. Tout comme sa collègue, elle propose l’attiéké ivoirien et l’attiéké burkinabè.

Pour elle, l’attiéké local se défend bien face auprès des consommateurs. Pour ce qui est de l’attiéké ivoirien, la vendeuse indexe des difficultés liées à l’importation. « Ce qui pose problème pour le cas de l’attiéké ivoirien, c’est la lenteur de l’importation. Quand ça met du temps en route, ça devient aigre et il se vend difficilement. La réalité est que l’attiéké ivoirien prend le dessus car le stock que j’avais est déjà épuisé » confie-t-elle  

Du côté Est de la place Tiéfo Amoro, au bord du goudron, Awa Traoré est une autre vendeuse de produits tropicaux. Assise et concentrée sur son téléphone, comme pour tuer le temps face à la lenteur du marché, notre présence capte son attention.

Informée de l’objet de notre présence, elle partage avec nous son expérience avec les deux variétés d’attiéké. Après un moment d’échange, elle livre son constat sur les différences entre l’attiéké ivoirien et burkinabè. « Il y a une petite différence entre l’attiéké de la Côte d’Ivoire et celui du Burkina Faso parce que ce n’est pas le même processus de production. En Côte d’Ivoire, on épluche le manioc et on produit l’attiéké sur place. Ce qui donne un goût distinct. Au Burkina Faso, en revanche, on reçoit généralement la pâte de manioc avant de procéder à la transformation. Cette étape intermédiaire peut altérer le goût, surtout quand la pâte met du temps à arriver », explique-t-elle.

Selon elle, la situation actuelle du pays limite considérablement le marché local. « Avec le contexte sécuritaire actuel, il nous est devenu difficile de nous rendre dans les villages pour écouler notre marchandise. Ce qui restreint fortement nos débouchés. Certains venaient d’autres localités pour s’approvisionner. Des routes étant fermées, ces derniers ne peuvent plus se le permettre », fait savoir Awa Traoré.

À Bobo-Dioulasso, le marché de l’attiéké est partagé entre deux réalités. L’attiéké ivoirien, même s’il peut parfois arriver en mauvais état à cause du temps d’importation, reste prisé par beaucoup de consommateurs.

De son côté, l’attiéké burkinabè fait face à des critiques liées à sa qualité. Une situation qui handicape son adoption. Mais les vendeuses d’attiéké de Bobo-Dioulasso semblent déterminées à imposer l’attiéké local dans l’optique de briser la chaîne de dépendance vis-à-vis de la Côte d’Ivoire.

Abdoulaye Konkobo, Ackim Traoré & Dofinitessan Kini (stagiaires)/Ouest Info

La rédaction
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Ouest Info est un média en ligne basé à Bobo-Dioulasso dans la région de l’Ouest du Burkina Faso.

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