Le Burkina Faso célèbre le 20 octobre de chaque année, la journée nationale de la liberté de la presse. Dans le cadre de la commémoration de l’édition 2024 de cette journée, le Centre national de presse Norbert Zongo et la presse nationale publient quatre éditos de Norbert Zongo toujours d’actualité. Question d’interpeller sur la situation de la presse. En voici le premier des quatre éditos.
Non ! Ce n’est pas parce nous sommes journalistes. Ce n’est pas cela ! Mais dites-nous : que serait notre processus démocratique sans la presse, la nôtre ?
A quel niveau aurait été la liberté d’expression, mère de toutes les libertés, sans notre presse malgré ses insuffisances et ses imperfections ?
La réponse à ces questions peut faire trembler d’effroi si on tient compte de l’évolution des formations politiques – toutes tendances confondues – de notre pays, et surtout du « nomadisme » et de l’inconstance des acteurs de notre scène politique.
Nous pensons que les Burkinabè ne doivent pas perdre de vue cet aspect des choses : si la presse devait être soustraite de l’échafaudage démocratique, tout le système croulerait. Des pays comme le Danemark – surtout – les Etats-Unis et la France le savent bien et soutiennent la presse burkinabè. Certes notre pays vit une pauvreté officielle, et ses habitants ne sont guère nantis, mais il y a au moins la possibilité du soutien moral, au moins cela, à défaut du soutien matériel ! (…)
C’est logique et juste que l’opinion publique réclame plus de rigueur à sa presse. Mais n’est-il pas plus juste que cette opinion cherche à comprendre mieux avant de juger et de condamner ?
Nous ne réclamons pas un soutien aveugle à la presse ; que l’on nous comprenne. Mais nous demandons à l’opinion publique d’être vigilante. Elle doit se méfier des vérités d’Etat et savoir gratter l’écorce des apparences pour éviter le simplisme.
Bien sûr, l’opinion publique ne peut être condamnée pour diffamation (même les terribles « diffamamologues » de notre Code de l’Information n’ont pas prévu d’articles à cet effet), mais en supposant sans avoir beaucoup d’informations une accusation de diffamation, on diffame la presse elle-même, pire on la tue.
Souvenons-nous : entre la démocratie et l’Etat d’exception, il n’y a qu’un rempart : la presse. Ne laissons pas briser ce rempart ! Le Burkina Faso nous le revaudra.
L’Indépendant n°5 du 31 août 1993